Le fil sur Facebook
Depuis la création de notre association en 2015, notre chanteur Allan publie chaque soir de spectacle en maison de retraite, EHPAD ou Centre Hospitalier un mot évoquant son ressenti sur le concert du jour et la réception de celui-ci par les résidents 👀.
L’occasion pour lui de partager les coulisses de son métier passionnant, ses rencontres, quelques anecdotes mais aussi les émotions fortes qu’il traverse avec le public sénior si bienveillant et toujours en demande de musique et de fête.
Il y publie aussi régulièrement des vidéos de reprises de Chansons Françaises d’hier et d’aujourd’hui, des concerts live, ses compositions personnelles (puisqu’il est également auteur compositeur)…
(Les visages, les noms des résidents ne sont jamais publiés sur les réseaux sociaux.)
« Mon grand-père était musicien. Lu comme ça, cela peut sembler banal. Des musiciens, il y en a plein.
Cependant, cette “banale” idée qu’il a eue un jour de vouloir s’essayer à souffler dans une clarinette est devenue mon chemin de vie. Comme celui de mon frère batteur, de ma sœur flûtiste, le tout grâce à mon père tromboniste de jazz qui voulait lui aussi marcher dans les pas du sien. Mon grand-père a été sociétaire de l’harmonie du village de Béthencourt-sur-mer près de 80 ans. Sa médaille trône toujours dans le salon.
Il y a un peu plus de huit ans, le jour où il n’a plus eu assez de souffle pour jouer, alors il a commencé à oublier les clés sur le contact dans la voiture. Il a oublié d’aller chercher son « Canard Enchaîné » pendant deux, trois, cinq semaines, puis il a commencé à lire l’horloge à l’envers et me dire qu’il avait raté le train pour Paris depuis sa chambre en maison de retraite.
Il n’était “là” que lorsque nous n’étions pas là : Il passait des heures entières assis dans son fauteuil devant sa chaîne hi-fi à écouter de la musique classique, du jazz. Lorsque nous entrions dans sa chambre il baissait le volume, se levait, souriait, discutait en toute lucidité une dizaine de minutes, puis il s’évadait, il s’estompait, comme le volume de sa musique.
Dès son admission dans l’établissement qui l’a accueilli, j’ai demandé à venir y chanter, régulièrement, pour le distraire autrement, pour être là et “en musique” auprès de lui. Lors du dernier récital, son état s’était considérablement dégradé. Il est pourtant resté, le regard vif sur sa chaise pendant tout le concert, à m’applaudir et je pense même qu’il était fier. Je dois dire que ce dernier moment de partage entre mon grand-père et moi, le petit-fils devenu musicien à son tour, cette lueur que j’ai eu la chance unique d’apercevoir à ce moment de sa vie m’a profondément changé.
Je chantais déjà depuis près de 10 ans mais c’est ce jour-là que j’ai réellement compris à quoi servait mon métier. J’ai compris que l’unique passerelle entre mon grand-père et le reste du monde, c’était la musique. Le seul moyen de l’atteindre, la seule façon qui s’offrait à moi de le réconforter. »
Des sourires, des photos comme ça, j’en ai des centaines… et des souvenirs bien plus encore, innombrables, indélébiles, qui ressurgissent chaque fois que je chante. Ils passent par ces regards et les émotions de toutes ces (trop) nombreuses personnes touchées par Alzheimer et qui s’évadent grâce à la musique. 🦋